Et bien oui, d’abord sans doute parce que je commence à m’ennuyer, mais aussi et surtout parce j’ai trouvé la situation drôle, rafraîchissante et que cela m’a fait un bien fou, au niveau intellectuel.
Il faut un rien de contexte : depuis plus ou moins dix ans, je dors avec une Cipap, c’est-à-dire une machine qui m’empêche automatiquement de faire des apnées du sommeil. Lorsque j’arrête de respirer, elle se met en surpression et oblige mes poumons à absorber de l’oxygène. J’ai été consulter après que trois nuits d’affilées, je me sois réveillé en train de suffoquer… Depuis son arrivée à la maison, elle représente pour moi un facteur de sécurité : je me mets au lit, j’enfile le masque et trois minutes plus tard je dors. Le type de masque que je porte est un Mirage FX, et je dis toujours qu’à la vitesse supersonique à laquelle je m’endors, il faut bien un Mirage…
Le dernière nuit à l’USI s’est passée avec ma Cipap plutôt qu’avec leur grosse Bipap, c’est la réussite qui m’a permis de changer de service.
Depuis mon arrivée en pneumologie, il y a un malaise entre le personnel de nuit et moi. En fait, le règlement de sécurité hospitalière empêche l’utilisation de tout dispositif aérosolisant en chambre, entre autres parce que les différences de pression entre les chambres et les couloirs ne répondent pas du tout aux mêmes normes qu’à l’USI et qu’apparemment ma version du Covid est particulièrement virulente, pas question de l’utiliser.
Ma réponse fut : « et si demain matin vous me retrouvez mort à la suite d’une apnée, vous direz et penserez quoi ? »
Je l’ai donc utilisée en prenant bien soin de la couper une demi-heure avant leur arrivée.
Hier, en début d’après-midi, l’assistante du pneumologue vient me trouver en insistant sur le fait que je ne peux plus l’utiliser. J’ai marqué mon profond désaccord et la pauvre est repartie toute penaude.
Fin d’après-midi, débarque une pneumologue séniore, charmante dans l’attitude, elle se présente et précise qu’elle vient parler de la Cipap. De mon côté, je lui dis qu’à mes yeux un conflit d’opinion n’est jamais un conflit de personnes.
Donc, elle m’explique qu’elle a été appelée « à la rescousse », qu’elle vient d’analyser mon dossier sur le « réseau santé wallon » (pour autant que le particulier marque formellement son accord, l’ensemble des données médicales y sont regroupées). Qu’elle a vu que ma première Cipap venait de Jolimont, que je suis confluent (je l’utilise toutes les nuits), etc, etc.
Ma réaction : enfin quelqu’un qui va parler en sachant de quoi elle cause. Je lui explique alors que selon ma logique d’ingénieur, face à un problème de ce type, je commence par exploiter les données à ma disposition, par exemple la carte mémoire de ma Cipap, avant d’émettre une espèce de « diktat » basé sur des règlements.
Elle éclate de rire : vous savez, nous, les médecins, sommes moins rigoureux que vous, les ingénieurs. Maintenant je comprends parfaitement votre réaction. Je vais, je l’espère, vous rassurer : sans votre Cipap, il n’y a aucun risque d’une apnée fatale, déjà l’oxygène que vous recevez en permanence va l’empêcher. Mais, par contre, ce qui est certain, c’est que sans elle vous dormirez beaucoup moins bien cette nuit.
Voilà un raisonnement que je peux comprendre et admettre, je me passerai de la Cipap.
Afin de faciliter, si nécessaire, la transition, nous décidons de concert de faire un nouveau frottis Covid, car je suis dans la période « de rémission » et si je ne suis plus contagieux, tous ces tracas disparaîtront d’eux-même.
Et voilà
